jeudi 30 octobre 2008

Musées : Les privés prennent le relais


Officiellement ouvert en 2000 à l'occasion du sommet France-Afrique, le musée national a de la peine à attirer du monde alors que les initiatives privées fleurissent à Yaoundé.
Jeudi, 23 octobre dernier, la ville de Yaoundé s'est enrichie d'un musée privé: " La Blackitude ". Sa promotrice, Sa Majesté Fô Nab Ngo I Nana Sunjio Agnès, préfère le mettre dans la catégorie des centres d'art. A l'intérieur de cet espace à l'entrée duquel un message rappelle au public que défendre sa culture s'est la protéger; ce sont près de 1000 pièces qui occupent l'espace. Il s'agit en majorité de statuettes et statues rituelles en bois et en céramique.
Mais des costumes de danses traditionnelles dont ceux des Grassfield y sont également exposés. L'ouverture de ce musée dont l'objectif, selon l'initiatrice est de "conserver, de documenter, de valoriser, et de diffuser des arts et cultures du Cameroun et d'Afrique, dans tous leurs aspects " (Mutations N°2267 du lundi 27 octobre 2008), coïncide avec celle de la Fondation Salomon Tandeng Muna et, de son musée en juin dernier.

Ici, en plein coeur de la ville, ce sont près de 8.00 pièces avec une dominante pour la sculpture, les masques, les statuaires de bois et de bronze et des éléments divers de la Culture tel le matériel et le mobilier domestique ainsi que de prestigieuses parures qui sont présentés au public qui, chaque jour, vient découvrir ces pièces rares. Une hôtesse est d'ailleurs commise à l'accueil de ces amateurs. Elle les guide chaque jour dans les dédales de la fondation, mais surtout, du musée qui semble être le lieu le plus prisé de cet espace
Ces deux musées viennent ainsi se joindre à une pléiade d'autres espaces du même genre qui ont été ouverts au fil des ans par des particuliers dans la ville de Yaoundé. Parmi ceux-ci, le musée des arts Bantous situé au quartier Bastos à Yaoundé, le musée Afhémi situé au lieu dit rue Damase à Yaoundé…

Alors, qu'est-ce qui fait courir les promoteurs privés vers la création de musées? D'après Alexandra Loumpet-Galitzine de l'Université de Paris I " Par ailleurs, le développement, ces dix dernières années, d'un fort courant d'intérêt en faveur de l'identité culturelle " en est à l'origine. Les promoteurs quant à eux répondent tous, unaniment que leur intitiative est guidée par: "L'envie de mettre à la disposition du public camerounais et étranger des collections qui leur parlent de notre culture ".

Et Germain Loumpet, conservateur du musée de la fondation Tandeng Muna de préciser : "Le musée qui abrite les collections Muna n'est pas davantage destiné à procurer uniquement de la délectation et de l'agrément mais tente d'apporter quelques enseignements sur l'évolution". Pour la plupart de ces propriétaires de musées privés au Cameroun, il est important de faire connaître le riche patrimoine culturel du Cameroun qui, bien que connu et apprécié au delà de ses frontières, demeure insuffisamment exposé à travers le pays du fait de l'importance des collections camerounaises à l'étranger, exportées légalement ou non. Le plus souvent, c'est la mauvaise organisation de ce que l'on présente comme étant le musée national du Cameroun qui semble être le déclencheur de la création de ces différents musées.

Infrastructures
Combien de fois en effet n'a-t-on pas remarqué cet air ahuri de touristes et visiteurs locaux, regardant la maigre collection des pièces de reproduction exposées ici et là sans un soin particulier ?
Comme le musée national, plusieurs de ces musées privés souffrent du manque d'infrastructures adéquates pour la préservation et la conservation des pièces. Alors que sur le flanc du Mont-Fébé, le Monastère bénédictin s'en est doté et offre heureusement, dans 3 salles, une collection de quelque 400 objets, masques, tabourets, lits, panneaux muraux sculptés, pipes, vaisselle, cornes à boire, figurines diverses, bijoux, objets utilitaires ou chargés de signification sociale ou religieuse depuis le 1er janvier 1970.

Dans son article paru dans l'édition de janvier/février 2008 de la revue " The courrier, le magazine de l'Afrique ", Ruth Colette Afane Bellinga, historienne de l'art et professeur à l'Université de Yaoundé I, précise qu'en plus du manque d'espace et d'équipement nécessaires pour l'exposition permanente, les moyens financiers sont très limités pour le bon fonctionnement des musées, l'équipement de contrôle du climat, les services éducatifs, les missions de collecte et de transport des œuvres à travers le pays et pour le montage des bibliothèques spécialisées en muséologie et en sciences auxiliaires, les œuvres sont donc exposées à divers facteurs de dégradation. Par ailleurs, ces musées manquent de personnel qualifié.


Dorine Ekwè

http://www.quotidienmutations.info/mutations/oct08/1225380276.php

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